L’AP-HP a lancé CORIMUNO-19, une étude de grande envergure pour déterminer l’efficacité des stratégies thérapeutiques chez les adultes hospitalisés avec le COVID-19 : nous avons échangé avec Vincent Lévy, responsable du Département de Recherche Clinique du Groupe Hospitalier Paris Seine-Saint-Denis et professeur des universités – praticien hospitalier à l’université Sorbonne Paris Nord – hôpital Avicenne, sur le déroulement et les objectifs de cet essai clinique.
Pouvez-vous nous rappeler quelles sont vos fonctions au sein de l’université Sorbonne Paris Nord et de l’hôpital Avicenne ?
Je suis responsable du Département de Recherche Clinique du Groupe Hospitalier Paris Seine-Saint-Denis, structure regroupant l’Unité de Recherche Clinique (URC) et le Centre de Recherche Clinique (CRC). Sur le plan universitaire, je suis professeur des universités – praticien hospitalier (PU-PH) en pharmacologie clinique avec une orientation marquée en hématologie et en méthodologie des essais cliniques.
Quel est l’objectif de cet essai clinique, qui porte sur les effets d’anticorps pendant la phase grave du Covid-19 ?
Il s’agit d’un essai construit comme une cohorte de patients hospitalisés, infectés par le SARS-CoV-2, nécessitant ou non une prise en charge en réanimation. Au sein de cette cohorte sont menés successivement plusieurs essais randomisés contrôlés testant l’intérêt de plusieurs anticorps ou immunomodulateurs. La succession des essais randomisés et leur analyse permet de redéfinir au cours du temps – en fonction des résultats – un éventuel nouveau traitement standard. Les premiers médicaments testés sont deux molécules anti-IL6R et un anti-IL1R.
Les molécules anti-IL6R et anti-IL1R sont des médicaments déjà utilisés dans certaines maladies inflammatoires comme la polyarthrite rhumatoïde. Ils ont une action anti-inflammatoire qui pourrait être importante dans le contrôle des manifestations graves du Covid-19.
L’une des originalités de ce protocole réside dans ses modalités d’analyses – Bayesiennes – permettant d’actualiser fréquemment les résultats en fonctions des données recueillies. Ce type d’analyse permet de conclure au plus tôt à l’efficacité (ou l’inefficacité) d’un traitement sans attendre nécessairement l’inclusion du nombre prédéfini de patient dans l’essai.
Comment se déroule concrètement cet essai ?
Les délais pour la mise en place de cet essai ont été extrêmement courts en raison de la nécessité à proposer au plus vite des traitements aux patients. L’ensemble de la chaîne des acteurs a travaillé dans l’urgence que ce soit pour la conception de l’essai, sa rédaction, la mise en place des circuits pharmaceutiques, l’obtention des autorités réglementaires, la mobilisation des équipes cliniques et de recherche sur les différents sites.
Le site Avicenne est ouvert depuis peu et les premiers patients sont déjà inclus avec une implication totale des équipes cliniques, de la pharmacie, et de l’ensemble du personnel de l’URC, médecins, chefs de projets, techniciens et attachés de recherche clinique. L’ensemble des acteurs a travaillé sans compter, alors même que la charge de travail sur l’hôpital n’a jamais été aussi lourde.
Quand les premiers résultats sont-ils prévus ?
Les premiers résultats devraient être disponibles d’ici une semaine et pourront potentiellement modifier rapidement la prise en charge des patients.